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Véronique Paré

Le processus créateur d'une (modeste) cheffe

Avoir le goût absolu, c’est comme avoir l’oreille absolue. C’est être « spot on » sur le goût à chaque fois. À l’école, je n’étais pas la plus rapide, ni la mieux organisée, mais une chose impressionnait mes professeurs, c’était mon sens du goût. J’ignore d’où cela me vient et c’est à l’école de cuisine que j’ai pris conscience de ce fait.


Chez nous, ma mère se débrouillait en cuisine. Les pâtés chinois, les spag, les macaronis à la viande, les ragoûts de boulettes de ce monde trônaient sur notre table. Parfois, pour alléger sa tâche de mère monoparentale, elle achetait du « tout prêt » : Hamburger Helper, pâté mexicain, croquettes de poulet, etc. Les classiques, quoi. D’autres fois, elle innovait avec son riz espagnol ou sa sauce aux œufs. Je n’ai pas souvenir que ma mère, ni mon père d’ailleurs, aimaient particulièrement cuisiner. Ils cuisinaient parce qu’il fallait le faire, parce que c’était normal de le faire, non par passion.


Une chose que je sais de mon enfance, c’est que j’ai toujours été gourmande. La nourriture était un refuge pour la petite anxieuse que j’étais. Je crois que manger était une façon pour moi de m’absorber dans quelque chose afin d’oublier mes tourments d’enfant. J’ai vite compris que le pain de ménage de grand-maman était plus qu’un simple pain, que c’était la combinaison parfaite du moelleux et du croustillant. J’ai compris que les crêpes de « pépère » était le divin amalgame du sucré et du salé. Bref, qu’un plat pouvait avoir plusieurs dimensions en termes de goût et/ou de texture.


Et c’est ainsi que je crée mes plats pour Les 5 Moulins. J’essaie d’y mettre goût et texture. Plus encore, j’essaie d’y mettre de la profondeur : des couches superposées de saveurs et de textures, des saveurs sur des saveurs, des textures sur des textures, le tout afin de donner au client une expérience « bouchetative » explosive, complète, parfaite.

J’essaie également d’y mettre de la générosité et du beau. La générosité car c’est ainsi que je suis au fond de moi et le beau car je crois qu’il en manque dans ce monde.


Alors si vous dégustez un plat aux 5 Moulins et que le temps s’arrête pour vous quelques minutes, que vous êtes transportés ailleurs dans un monde de saveurs, de texture, de générosité et de beau, c’est que j’ai réussi ma mission, c’est que j’ai pu vous transmettre cette partie de moi que j’ai offert aux 5 Moulins et qui constitue maintenant l’ADN de ce restaurant.

Bon appétit!



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